En Suisse, l’intention de rejoindre Daech suffit pour être condamné


La justice helvétique a franchi le pas en sanctionnant un prétendant au djihad, arrêté à l’aéroport de Zurich, avant même qu’il ne prenne l’avion.

Aurait-on pu stopper Mohamed Lahouaiej Bouhlel juste avant qu’il ne monte dans son camion pour commettre ce massacre à Nice, si la police avait eu connaissance de ses intentions meurtrières ? Répondre à cette question consiste à en poser deux autres : peut-on arrêter un apprenti terroriste, qui n’est pas encore passé à l’acte ? Puis ensuite le juger pour un crime qu’il n’a pas encore commis ? À ces interrogations, la justice suisse, pour la première fois, a répondu positivement en condamnant en fin de semaine dernière Ahmed, un Libano-Suisse âgé de 26 ans. Il avait été arrêté le 7 avril 2015 à l’aéroport de Zurich alors qu’il s’apprêtait à s’envoler vers la Turquie, pour ensuite rejoindre l’organisation État islamique en Syrie.

Pour le condamner, certes, à une peine légère – dix-huit mois avec sursis –, le Tribunal pénal fédéral, la plus haute instance judiciaire de la Confédération, s’est appuyée sur la loi fédérale interdisant les groupes Al-Qaïda et État islamique. Le simple fait « d’encourager les activités » de ces organisations terroristes est puni d’une peine pouvant aller jusqu’à cinq ans d’emprisonnement. Or, l’enquête a pu démontrer qu’Ahmed, né en Suisse dans une famille libanaise d’origine modeste, a eu des contacts réguliers avec l’organisation terroriste pendant huit mois. Pour rejoindre Daech, il est entré en relation avec un passeur à la frontière turco-syrienne et il s’est procuré un billet d’avion. « Toute intention de vouloir rejoindre un groupe de combattants en Syrie revient à les soutenir, même sans organisation concrète d’action (…) Car ce n’est qu’avec des recrues que les groupes peuvent commettre leurs crimes », souligne Juliette Noto, procureure générale, citée par La Tribune de Genève.

Il voulait mourir en martyr

Par ailleurs, Ahmed était en possession de vidéos de décapitation, de lapidation, de crucifixion. Enfin, en novembre 2014, communiquant avec son amie, Ahmed lui aurait avoué son souhait de « mourir en martyr », ajoutant qu’il savait que son déplacement en Syrie pouvait lui valoir cinq ans de prison. Pour sa défense, le Libano-Suisse a affirmé qu’il n’allait en Syrie que pour rendre visite à des amis et pour participer à un programme d’aide humanitaire en faveur des victimes de la guerre civile. Des explications qui n’ont guère convaincu le tribunal pénal fédéral.

Le Ministère public de la Confédération réclamait deux ans de prison avec sursis. Le candidat au djihad n’a finalement été condamné qu’à dix-huit mois. Une clémence due à son assiduité au programme de déradicalisation. Chômeur, le prétendant au djihad vit aujourd’hui à Winterthur, en Suisse alémanique, chez sa mère, avec sa femme et leur fils, grâce à l’aide sociale. Au moment de son arrestation à l’aéroport de Zurich, en avril 2015, sa compagne était enceinte de deux mois.

Des capacités intellectuelles limitées

Contrairement à beaucoup d’autres volontaires pour intégrer les rangs de l’organisation État islamique, ce Libano-Suisse n’est jamais tombé dans la délinquance. C’est au contraire un homme très religieux, fréquentant la mosquée quotidiennement. Malheureusement une mosquée influencée par l’islam radical. À la suite de l’ancien champion du monde de boxe thaïe, Valdet Gashi, d’origine kosovare, plusieurs jeunes de Winterthur ont rejoint les rangs de Daech en Syrie. Selon certaines sources, Valdet Gashi aurait été tué depuis.
Évoquant Ahmed, le quotidien Le Temps de Lausanne parle d’un jeune homme aux capacités intellectuelles limitées, peu scolarisé, très influençable, et qui n’a jamais pu conserver longtemps de petits boulots, dans une station-service ou dans une entreprise de jardinage.

Source : Le Point


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