Des études révèlent que l’autocensure augmente aux États-Unis et en Allemagne


Nous savons qu’un grand nombre d’universitaires et d’étudiants s’abstiennent d’exprimer leur point de vue sur certains sujets par crainte d’être dénoncés, malmenés ou sanctionnés officiellement. L’autocensure sur les campus est fréquemment évoquée dans les médias – à juste titre. Mais qu’en est-il dans la population en général ? Et comment a-t-elle évolué au fil du temps ?

Récemment, deux études pertinentes ont été portées à mon attention. La première concerne les États-Unis. Dans un article publié l’année dernière, James Gibson et Joseph Sutherland ont rassemblé toutes les enquêtes qu’ils ont pu trouver et qui posaient une question simple aux Américains : “Qu’en est-il de vous personnellement ? Vous sentez-vous, oui ou non, aussi libre de dire ce que vous pensez qu’avant ?”

Cette question n’est pas forcément idéale, mais elle a l’avantage d’avoir été posée pour la première fois au peuple américain en 1954 par le sociologue Samuel Stouffer, ce qui permet d’étudier les tendances à long terme. Lorsque les auteurs ont calculé le pourcentage de personnes ayant déclaré ne pas se sentir libres de dire ce qu’elles pensaient au fil du temps, voici ce qu’ils ont constaté :

Graphique extrait de “Keeping Your Mouth Shut: Spiraling Self-Censorship in the United States”.

On constate une nette augmentation de l’autocensure. (Il convient toutefois de noter que les années sur l’axe des x ne sont pas toujours consécutives, car elles représentent les années spécifiques au cours desquelles les enquêtes étaient disponibles). En 1954, seuls 13 % des Américains déclaraient ne pas se sentir libres de dire ce qu’ils pensaient. En 1987, ce chiffre était passé à 21 %, en 2011 à 31 % et en 2020 à 46 %.

Ainsi, environ la moitié des Américains disent ne pas se sentir libres de dire ce qu’ils pensent. Il est intéressant de noter qu’une grande partie de l’évolution observée depuis 1954 s’est produite au cours des dix dernières années seulement, ce qui correspond au Grand Réveil.

La deuxième étude qui a retenu mon attention vient d’Allemagne. Des chercheurs de l’institut de démoscopie Allensbach ont demandé à un échantillon d’Allemands : “Avez-vous le sentiment que vous pouvez exprimer librement votre opinion politique en Allemagne aujourd’hui, ou vaut-il mieux être prudent ?”

Cette question a été posée pour la première fois en 1953 (en Allemagne de l’Ouest), mais les chiffres publiés dans l’étude ne remontent malheureusement qu’à 1990 (année de la réunification). Voici ce que les chercheurs ont découvert :

“Kann frei reden” signifie “Peut parler librement”, tandis que “Besser vorsichtig sein” signifie “Mieux vaut être prudent”. Graphique tiré de Zeit Online.

Ici aussi, l’autocensure a fortement progressé. En 1990, seuls 16 % des Allemands déclaraient qu’il valait mieux être prudent. En 2017, ce chiffre est passé à 25 % et à 44 % en 2023. Comme aux États-Unis, près de la moitié de la population déclare ne pas se sentir libre d’exprimer ses opinions politiques, une grande partie du changement s’étant produite au cours des dix dernières années seulement.

Il est intéressant de noter que les chercheurs ont constaté que seuls les électeurs des Verts étaient majoritaires à déclarer qu’ils pouvaient exprimer librement leurs opinions politiques. Parmi les partisans du parti Alternative für Deutschland, 62 % ont déclaré qu’il valait mieux être prudent. Ce clivage gauche-droite est également présent aux États-Unis, où les républicains sont beaucoup plus enclins à s’abstenir en raison du climat politique.

Depuis le début du grand réveil, en 2012 environ, les Américains et les Allemands sont beaucoup plus enclins à s’autocensurer. Et il est presque certain qu’il en va de même dans d’autres pays occidentaux. Voilà pour l’Occident libéral.

Lire aussi : Les élites de Davos se plaignent du manque de censure sur X

Source : The Daily Sceptic – Traduit par Anguille sous roche


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