La spiritualité pourrait être « profondément ancrée dans notre tissu neurologique »


La conscience peut être à la fois une bénédiction et une malédiction. Lors des premiers pas de l’humanité sur cette planète, le monde semblait radicalement différent.

Les mystères étaient partout et le sentiment d’incertitude était toujours présent. Il n’est donc pas étonnant que pratiquement toutes les cultures, à différentes époques et dans différentes régions du monde, aient indépendamment inventé des cadres religieux pour apaiser leur peur existentielle.

Même à notre époque, plus de 80 % des personnes dans le monde s’identifient comme étant religieuses ou spirituelles. Cela s’explique par le fait que, pour la plupart du moins, les croyances spirituelles sont peut-être inscrites dans notre cerveau.

Au cours de précédentes recherches, des scientifiques ont effectué des scanners cérébraux pour voir quelles zones du cerveau s’activaient lors de l’exécution d’une tâche chez les personnes spirituelles par rapport aux personnes non spirituelles. Toutefois, la nature corrélative de ces recherches est intrinsèquement limitée.

Pour aller au fond des choses, des chercheurs du Brigham and Women’s Hospital de Boston, dans le Massachusetts (Etats-Unis), ont adopté une approche beaucoup plus radicale pour cartographier la spiritualité dans le cerveau que ce que d’autres groupes ont tenté par le passé.

Michael Ferguson et ses collègues ont utilisé une technique connue sous le nom de cartographie des réseaux de lésions (lesion network mapping), qui permet d’attribuer des comportements humains complexes à des circuits cérébraux spécifiques en fonction de l’emplacement des lésions cérébrales des patients. Si un certain comportement cesse ou, au contraire, est déclenché par une certaine lésion, cela signifie que la région cérébrale correspondante doit être impliquée d’une manière ou d’une autre.

L’équipe a exploité un ensemble de données concernant 88 patients ayant subi une opération du cerveau pour retirer des tumeurs réparties dans tout le cerveau. Les patients ont également répondu à une longue enquête comprenant des questions relatives à l’acceptation spirituelle avant et après leur opération.

Sur les 88 patients, 30 ont montré une diminution de leur croyance spirituelle autodéclarée avant et après la résection neurochirurgicale de la tumeur cérébrale, 29 ont montré une augmentation, et 29 n’ont montré aucun changement.

En utilisant la technique de cartographie des réseaux de lésions, les chercheurs ont associé les changements dans les croyances spirituelles aux circuits cérébraux de la substance grise périaqueducale (PAG), une région du tronc cérébral qui a été impliquée dans de nombreuses fonctions, notamment le conditionnement à la peur, la modulation de la douleur, les comportements altruistes et l’amour inconditionnel.

Selon Ferguson, chercheur principal au Center for Brain Circuit Therapeutics de Brigham :

Nos résultats suggèrent que la spiritualité et la religiosité sont enracinées dans des dynamiques neurobiologiques fondamentales et profondément ancrées dans notre tissu neurologique. Nous avons été étonnés de constater que ce circuit cérébral de la spiritualité est centré dans l’une des structures du cerveau les plus préservées du point de vue de l’évolution.

Les résultats du premier ensemble de données ont été validés avec un second ensemble impliquant plus de 100 patients présentant des lésions cérébrales causées par un traumatisme crânien survenu lors des combats de la guerre du Vietnam. On a posé à ces patients des questions telles que “Vous considérez-vous comme une personne religieuse ? Oui ou non ?” après avoir subi des lésions cérébrales.

Cependant, le fait que tous les participants à cette étude étaient issus de cultures majoritairement chrétiennes et le manque d’informations solides concernant l’éducation des patients sont deux limitations importantes. Les chercheurs devraient répéter l’étude sur de nombreux autres milieux pour valider le lien entre la spiritualité et la substance grise périaqueducale.

Pour Ferguson, ces recherches ne sont pas simplement philosophiques. Il pense qu’elles peuvent déboucher sur des applications pratiques importantes, notamment dans le domaine de la pratique clinique.

Toujours selon Ferguson :

Ce n’est que récemment que la médecine et la spiritualité ont été séparées l’une de l’autre. Il semble y avoir une union permanente entre la guérison et la spiritualité dans toutes les cultures et civilisations. Je m’intéresse à la mesure dans laquelle notre compréhension des circuits cérébraux pourrait aider à élaborer des questions scientifiquement fondées et cliniquement traduisibles sur la façon dont la guérison et la spiritualité peuvent se compléter.

L’étude publiée dans Biological Psychiatry : A neural circuit for spirituality and religiosity derived from patients with brain lesions.

Lire aussi : L’Esprit et Dieu : La nouvelle science de la neurothéologie

Source : GuruMeditation


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