Pourquoi la France passe de la note « AA » à « AA- » ?


La note financière de la France baisse encore selon l’agence de notation Fitch. On est loin du triple A il y a dix ans.

© Unsplash / Dan Asaki

Comme chaque année, les « big three » des agences de notation financière lèvent le voile sur leur évaluation des différents pays, afin de donner un aperçu de la confiance des investisseurs en fonction d’une économie, d’une situation politique et de la capacité de remboursement de la dette souveraine. Outre un regard sur les politiques économiques, budgétaires et monétaires, les agences de notation prennent aussi en compte des éléments parallèles pouvant entraîner de grosses répercutions, comme la popularité d’un gouvernement auprès de ses concitoyens.

Fitch est l’une de ces trois agences, avec Standard & Poor’s et Moody’s. Pour 2023, elle vient de dégrader la note financière de la France, de AA à AA-. C’est très simple, sur ces treize dernières années, jamais la France n’avait connu un tel classement. De 2010 à 2012, notre pays jouissait d’un triple A, avant de passer à AA+, attribué notamment par Fitch (les notes peuvent grandement différer selon les agences de notation) et en restant à la note de AA de 2014 au vendredi 29 avril 2023.

Qu’a-t-il donc pu changer entre aujourd’hui et ces neuf dernières années ? Selon l’agence Fitch, les perspectives de croissance limitée (0,2 %) sont loin d’être la seule raison. Il y a aussi le risque de voir une seconde crise énergétique l’hiver prochain dans le pays, qui ralentirait une nouvelle fois l’économie, tout comme le problème de la remontée des taux qui gèle les investissements et repousse les projets. L’inflation qui a grandement fait augmenter le prix des achats alimentaires est aussi une gêne pour la consommation plus générale – et donc la croissance.

L’effet contre-productif de la réforme des retraites

Ce qui a particulièrement retenu l’attention des médias est le point de l’agence sur les mouvements sociaux actuels. Les contestations, « parfois violentes”, des manifestants au sujet de la réforme des retraites a joué sur la dégradation de la France sur le barème des notes financières. Le rapport de Fitch mentionne « une impasse politique et des mouvements sociaux qui pourraient mener à une politique budgétaire plus expansionniste ou d’un renversement des réformes précédentes ».

Comprenez par là que le retard de la mise en place de la réforme des retraites et le potentiel revirement de situation sur la politique économique du Président Emmanuel Macron pourraient mettre des bâtons dans les roues aux réformes actuelles visant à réduire la dette publique et le déficit. Pour le ministre de l’Economie Bruno Le Maire, cette dégradation de la note par Fitch est regrettable, alors que l’agence « sous-évalue les conséquences des réformes », déclarait-il dans un communiqué. Des réformes qu’il qualifiait de “structurantes” pour le pays, et qui permettront d’ici 2024 pour le déficit et 2027 pour la dette de renverser les courbes.

Fitch est loin d’être aussi gros que Standard & Poor’s ou que Moody’s. Sa note aura pourtant des répercussions. Si les agences se contentent de « donner des opinions », leur note est pourtant prise très au sérieux, à la fois pour les investisseurs et les créanciers. Par conséquent, une note dégradée aura tendance à augmenter le coût de financement du pays en question. Autre problème : la notation a un effet « procyclique », renforçant donc la situation d’un pays en direction du pronostic donné par l’agence. Une véritable spirale.

La solution de la réindustrialisation

L’investissement en France n’a pas attendu une dégradation des notes financières des agences pour freiner. La politique monétaire en ces temps d’inflation a entraîné une hausse des taux d’intérêt, avec comme effet immédiat d’écarter les startups de levées de fonds spectaculaires à plusieurs centaines de millions d’euros (ou de dollars). Pour ne pas s’apitoyer sur son sort, la France profite de l’occasion pour revoir sa politique de soutien à l’innovation en retournant progressivement vers les projets industriels (avec le plan France 2030).

Les ambitions du gouvernement avec ses nouvelles pépites sont aussi d’aller pousser les plus gros projets de ces dix dernières années vers le marché des capitaux, à savoir la Bourse de Paris. Restera à voir si cela sera suffisant pour motiver les entrepreneurs à ne pas déménager à l’étranger. En sous-marin, les fonds d’investissement étrangers continuent de faire leurs emplettes et de monter au capital des jeunes startups. Wall Street reste encore et toujours la meilleure place de marché pour atteindre un rayonnement international aussi.

Lire aussi : L’eau potable en France contaminée à vaste échelle par les métabolites du chlorothalonil, un pesticide interdit depuis 2019

Source : Presse-citron


Vous aimerez aussi...

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *