Une proposition controversée visant à réduire le réchauffement de la planète pourrait menacer la régénération de l’ozone


La couche d’ozone, qui protège la vie sur Terre contre le rayonnement solaire mortel, est en passe de se reconstituer d’ici quelques décennies, mais des projets controversés de géo-ingénierie visant à freiner le réchauffement climatique pourraient annuler ces progrès, selon une importante évaluation scientifique publiée lundi.

Depuis le milieu des années 1970, certains aérosols industriels ont conduit à l’appauvrissement de l’ozone dans la stratosphère, située entre 11 et 40 kilomètres au-dessus de la surface de la Terre.

En 1987, près de 200 nations se sont mises d’accord sur le protocole de Montréal pour inverser les dommages causés à la couche d’ozone en interdisant les produits chimiques qui détruisent cette strate naturelle de molécules dans l’atmosphère.

Selon plus de 200 scientifiques, cet accord fonctionne comme prévu et correspond aux prévisions antérieures.

“L’ozone se rétablit, c’est une bonne nouvelle”, a déclaré à l’AFP John Pyle, professeur à l’université de Cambridge et co-président de Scientific Assessment of Ozone Depletion.

La couche d’ozone devrait être reconstituée – tant en surface qu’en profondeur – d’ici à 2066 environ dans la région de l’Antarctique, où l’appauvrissement de la couche d’ozone a été le plus prononcé, selon le rapport, publié conjointement par l’Organisation météorologique mondiale (OMM), le Programme des Nations unies pour l’environnement et des agences gouvernementales des États-Unis et de l’Union européenne.

Dans l’Arctique, le rétablissement complet interviendra vers 2045, et pour le reste du monde, dans une vingtaine d’années.

Une couche d’ozone intacte filtre la plupart des rayons ultraviolets à ondes courtes du soleil, qui endommagent l’ADN des organismes vivants et peuvent provoquer des cancers.

Au niveau du sol, cependant, l’ozone est un composant majeur de la pollution atmosphérique et exacerbe les maladies respiratoires.

Les efforts déployés pour réparer la couche d’ozone s’inscrivent dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique.

Comme un volcan

Selon l’évaluation, l’élimination progressive des substances appauvrissant la couche d’ozone – dont certaines sont de puissants gaz à effet de serre – aura permis d’éviter un réchauffement de 1 degré Celsius d’ici le milieu du siècle, par rapport à un scénario dans lequel leur utilisation aurait augmenté de 3 % par an.

Une catégorie d’aérosols industriels mis au point pour remplacer ceux qui sont interdits par le protocole de Montréal s’est également révélée être un puissant gaz à effet de serre et sera progressivement éliminée au cours des trois prochaines décennies en vertu d’un récent amendement au traité de 1987.

Mais si le monde s’est uni pour lutter contre la dégradation de la couche d’ozone, il n’a pas réussi à réduire les émissions de carbone assez rapidement pour éviter un réchauffement dangereux.

Un monde qui se situe à peine à 1,2 °C au-dessus des niveaux préindustriels a déjà été secoué par des vagues de chaleur, des sécheresses et des températures record, et se dirige vers un désastreux 2,7 °C au-dessus de cette référence.

Alors que les émissions continuent d’augmenter et que le temps presse pour éviter certains des pires impacts, des projets controversés de géo-ingénierie se retrouvent au centre des débats sur la politique en matière de changement climatique.

Il s’agit notamment de propositions visant à atténuer le réchauffement de la planète en déposant des particules de soufre dans la haute atmosphère.

Le rapport met toutefois en garde contre le risque d’inverser brutalement le processus de reconstitution de la couche d’ozone.

L’injection d’aérosols stratosphériques (SAI) est de plus en plus considérée comme une mesure palliative potentielle pour limiter les températures suffisamment longtemps pour s’attaquer au problème à la source.

La nature démontre que cela fonctionne : la violente éruption du mont Pinatubo, aux Philippines, en 1991, qui a craché des millions de tonnes de poussière et de débris, a fait baisser les températures mondiales pendant environ un an.

Des conséquences inattendues

Les scientifiques calculent que l’injection de 8 à 16 millions de tonnes de dioxyde de soufre dans la stratosphère chaque année, soit à peu près l’équivalent de la production du Pinatubo, refroidirait la température de la Terre d’environ 1 °C.

Des simulations effectuées au-dessus de l’Antarctique en octobre – lorsque le trou dans la couche d’ozone est le plus important – montrent que l’injection d’aérosols stratosphériques sur une période de 20 ans permettrait d’abaisser les températures mondiales de 0,5°C.

Mais il y a une contrepartie : la couche d’ozone serait ramenée à son niveau de 1990, soit un tiers seulement de ce qu’elle était avant l’impact de l’activité humaine.

Le monde verrait “un appauvrissement sévère et continu de l’ozone tant que cette gestion du rayonnement solaire se poursuit”, a déclaré M. Pyle.

Le groupe consultatif des Nations unies sur les sciences du climat, le GIEC, a mis en garde contre d’autres conséquences imprévues, allant de la perturbation des moussons africaines et asiatiques, dont des centaines de millions de personnes dépendent pour leur alimentation, à l’assèchement de l’Amazonie, qui se transforme déjà en savane.

Le nouveau rapport, le dixième à ce jour, met également en évidence une diminution inattendue de l’ozone dans la basse stratosphère au-dessus des régions tropicales et des latitudes moyennes peuplées de la planète.

Jusqu’à présent, les chlorofluorocarbones, ou CFC, et d’autres molécules ont principalement érodé l’ozone dans la haute stratosphère et au-dessus des pôles.

Les scientifiques étudient deux coupables possibles : les produits chimiques industriels non couverts par le protocole de Montréal, appelés “substances à très courte durée de vie” (VSLS), et le changement climatique.

Lire aussi : Cette startup franchit une ligne rouge en modifiant le climat

Source : ScienceAlert – Traduit par Anguille sous roche


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