L’affaire Epstein pousse Richard Stallman à démissionner du MIT et de la FSF


Richard Stallman, figure du mouvement du logiciel libre a démissionné de ses fonctions au MIT et à la FSF. Sa prise de position sur l’affaire Epstein a fait polémique.

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L’affaire Epstein, qui secoue les États-Unis depuis plusieurs semaines, mais aussi la France avec une enquête visant à déterminer l’étendue des ramifications du trafic de mineurs auquel le milliardaire américain — mort en cellule à la suite d’un suicide — était accusé de se livrer, provoque d’importants remous outre-Atlantique. Plusieurs figures intellectuelles ont ainsi été mêlées à la polémique, voire contraintes de se mettre en retrait.

Dernière personnalité en date être touchée : Richard Stallman. Celui à qui l’on doit le projet GNU, avec pour objectif de créer un nouveau système d’exploitation libre de droit, quitte non seulement le Massachusetts Institute of Technology (MIT), mais aussi la présidence de la Free Software Foundation (FSF). En cause : sa prise de position sur l’affaire Epstein dans des échanges de courriers électroniques.

Richard Stallman, figure du mouvement du logiciel libre. // Source : Numerama

Dans un très court billet de blog paru sur son site personnel, il annonce le 16 septembre qu’il « démissionne immédiatement » de son poste au CSAIL, un laboratoire de recherche en intelligence artificielle et en sciences informatiques du MIT. « Je fais cela à cause des pressions exercées sur le MIT et moi-même à cause d’une série de malentendus et de fausses interprétations », écrit-il.

Le départ de Richard Stallman de la présidence de la FSF a aussi été confirmé par la FSF elle-même. Le même jour, elle déclare que l’intéressé a quitté ses fonctions de président et de membre du conseil d’administration. Ce dernier annonce qu’il engage dès à présent une procédure pour se doter d’une nouvelle tête. La FSF indique qu’elle communiquera ultérieurement sur ce dossier.

Ces échanges, fuités par une ancienne élève du MIT, ont été publiés initialement sur Medium avant d’être repris par Vice. Ces derniers révèlent également le point de vue de Richard Stallman sur le sens à donner à une agression sexuelle et au viol et si ces deux évènements s’appliquent bien au cas présent. Pour lui, le « scénario le plus plausible » est un rapport sexuel consenti.

La façade du MIT. // Source : Tsuji

La confusion a porté sur l’expression « présentée à lui comme pleinement consentante », au sujet de la jeune femme de 17 ans qui a témoigné dans ce dossier. Des médias américains ont cru comprendre que Stallman défendait Jeffrey Epstein, mails il soulignait qu’on ne sait pas si Marvin Minsky était conscient de participer à un trafic sexuel. Dans son mail, Richard Stallman écrit que « si Epstein avait intimé [à la jeune femme] d’avoir un rapport sexuel avec Minsky », il est probable que la victime se soit « présentée comme consentante » à Minsky.

« L’injustice est dans le mot agresser. Le terme agression sexuelle est si vague et glissant qu’il facilite l’inflation de l’accusation », écrit-il. « Le mot agression présume qu’il a fait usage de la force ou de la violence, d’une manière non précisée, mais l’article lui-même ne dit pas une telle chose. Seulement qu’ils ont couché ensemble ». Il conclut : « Quelle que soit la conduite que vous voulez critiquer, vous devriez la décrire avec un terme spécifique qui évite le flou moral sur la nature de la critique ».

Ito, Lessig et Gates aussi dans la tourmente

Le départ de Stallman de la FSF et surtout du MIT s’inscrit dans une controverse plus large autour des liens entre le Massachusetts Institute of Technology et Jeffrey Epstein. En effet, il a été documenté que des centres du MIT, en particulier celui du Media Lab, un laboratoire de recherche dédié au numérique et à la technologie, ont continué à recevoir les généreux dons du milliardaire alors qu’il avait déjà été condamné.

Ces révélations ont ainsi conduit Joi Ito à quitter le Media Lab, qu’il dirigeait depuis 2011. En principe, le MIT n’était plus autorisé à recevoir les dons de Jeffrey Epstein depuis son passage devant la justice, mais le patron du Media Lab s’était arrangé pour continuer à les percevoir, en cachant soigneusement l’origine des fonds. Il le qualifiait même de « Voldemort », celui dont on ne doit pas prononcer le nom.

Joi Ito. // Source : David Silverman

Lawrence Lessig, un proche de Joi Ito, a également été mêlé à la polémique en tentant de prendre la défense du MIT et de justifier l’acceptation des dons, d’où qu’ils proviennent ou presque.

Selon ce professeur de droit à Harvard, à qui l’on doit les licences Creative Commons et qui est l’un des penseurs les plus en vue sur Internet et le numérique, dans un monde idéal, aucune institution ne devrait prendre de l’argent à des gens comme M. Epstein. Mais la réalité est qu’une grande partie de l’argent qui porte les universités et autres institutions provient de sources douteuses.

Le New Yorker, à l’origine des révélations sur Joi Ito, a aussi mentionné Bill Gates, en le décrivant comme un intermédiaire bien pratique : en octobre 2014, le Media Lab reçoit un don de 2 millions de dollars qui est décrit par Joi Ito dans des mails comme un don de Bill Gates via Jeffrey Epstein. Le nom de ce dernier ne sera pas mentionné. Un communiqué de Bill Gates a toutefois tenu à démentir toute relation avec le milliardaire.

Lire aussi : Bill Gates refuse d’expliquer pourquoi il a volé à bord du Lolita Express avec Jeffrey Epstein en 2013

Source : Numerama par Julien Lausson


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