Emmanuel Macron plaide pour une levée progressive de toute forme d’anonymat en ligne


Vers la fin de la liberté d’expression en France ?

Le 18 janvier, Emmanuel Macron a plaidé en faveur d’une « levée progressive de tout anonymat » devant les maires réunis pour le deuxième acte du grand débat national au Palais des congrès de Souillac (Lot). Le Président français estime que pour améliorer la qualité de la démocratie participative, l’on « doit aller vers une levée progressive de toute forme d’anonymat » en faisant mention de « processus où on sait distinguer le vrai du faux et où on doit savoir d’où les gens parlent et pourquoi ils disent les choses ». Macron pense que cela est nécessaire étant donné qu’aujourd’hui, « on a beaucoup d’informations, tout le temps, mais on ne sait pas d’où elles viennent. »

Ses propos ont immédiatement été perçus comme un écho à un discours qu’il a prononcé en novembre dernier à l’annonce de l’« appel de Paris pour la confiance et la sécurité dans le cyberespace ». Là, Emmanuel Macron avait averti que « nos gouvernements, nos populations ne vont pas pouvoir tolérer encore longtemps les torrents de haine que déversent en ligne des auteurs protégés par un anonymat devenu problématique ». Mettre fin à l’anonymat sur les sites n’est en effet pas nouveau comme idée pour pouvoir réduire les messages déplacés ou inappropriés sur Internet. Beaucoup s’accordent sur le fait qu’en rendant les utilisateurs responsables de leurs propos – en supprimant la possibilité de poster des messages dans l’anonymat –, il est moins probable qu’ils s’engagent dans des discussions ou publications inciviles.

En plaidant pour la fin progressive de l’anonymat en ligne, le Président français essaie-t-il aussi de préparer les esprits des gens à la future loi contre les discours de haine en ligne ? On peut bien le croire. Rappelons en effet que comme son voisin allemand l’a fait l’année passée, la France envisage de mettre en place une loi contre les discours de haine en 2019. « Les insultes, le harcèlement, les propos sexistes, racistes, homophobes, antisémites, antimusulmans, haineux, injurieux… doivent être supprimés plus vite des réseaux sociaux. Le gouvernement défendra en 2019 une loi en ce sens », avait annoncé en novembre dernier Marlène Schiappa, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations. Mais que pensent les défenseurs des libertés en ligne ?

« Ce genre d’obligations – si elles passaient par la loi – seraient impossibles à respecter pour les petits acteurs et risqueraient fort de renforcer davantage les grandes plateformes américaines », explique Félix Tréguer, de la Quadrature du Net, l’association de défense des droits et libertés des citoyens sur Internet. « Emmanuel Macron oublie que l’anonymat constitue un droit associé à la liberté d’expression et de communication et au droit à la vie privée. Il est reconnu comme tel au niveau international, notamment par la Cour européenne des droits de l’Homme », a-t-il ajouté, avant de rappeler que les élites politiques ont de « la méfiance envers la parole critique ou irrévérencieuse qui se déploie sur Internet. »

Devant les maires, Emmanuel Macron a essayé de défendre la suppression de toute forme d’anonymat, mais les arguments évoqués pèsent-ils plus que les bénéfices de pouvoir rester anonyme en ligne ? En tout cas, ce n’est pas ce que pense Félix Tréguer. Pour lui, « il conviendrait de combattre la vindicte dont [l’anonymat] fait l’objet en rappelant qu’il permet aussi de lutter contre les formes de harcèlement en masquant l’identité de cibles potentielles. Il libère la parole de groupes marginalisés qui sans l’anonymat ou le pseudonymat seraient enclins à s’autocensurer. De ce point de vue, mettre fin à l’anonymat serait donc contre-productif, en plus d’être attentatoire aux libertés publiques », dit-il.

Lire aussi : Sauver l’«Internet libre» ? Macron annonce que Facebook acceptera des «régulateurs français»

Sources : Developpez.com par Michael Guilloux – Vidéo YouTube, BFM TV


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