Intel pense que le métavers aura besoin d’une capacité de calcul mille fois supérieure à celle disponible actuellement


Ce que les ordinateurs d’aujourd’hui ne peuvent tout simplement pas offrir.

Intel s’est enfin exprimé publiquement sur le métavers, la dernière technologie (même si le mot n’est pas nouveau) qui suscite l’enthousiasme de toute l’industrie. Si le fabricant de puces est optimiste quant aux possibilités du métavers dans l’abstrait, Intel soulève un problème clef pour réaliser toutes les ambitions du métavers : il n’y a pas assez de puissance de traitement pour tout le monde. Il pense en effet qu’il faudrait multiplier par 1 000 la puissance de notre capacité de calcul collective actuelle pour être en mesure de donner vie au métavers.

Le métavers : à l’aube d’une nouvelle révolution informatique ?

Autrefois un concept de niche apprécié des passionnés de technologie, l’idée d’un monde virtuel centralisé, d’un “lieu” parallèle au monde physique, a fait son chemin cette année, comme en témoigne la décision de Facebook, en octobre, de changer de nom pour devenir Meta. Des millions de personnes passent des heures par jour dans des espaces sociaux virtuels comme Roblox et Fortnite. L’intérêt pour la propriété purement numérique – et la technologie qui, selon ses partisans, peut garantir la sécurité des expériences virtuelles persistantes – a connu une hausse spectaculaire, les NFT et les cryptomonnaies faisant les gros titres.

Les plateformes de productivité virtuelles se développent également, Meta et Microsoft annonçant de nouvelles façons de collaborer en ligne. Et selon les analystes, Nike se prépare même à vendre des baskets virtuelles. Les bureaux hybrides, l’enseignement par vidéo et les communautés sociales en ligne ne sont que quelques-unes des façons dont une plus grande partie de nos vies – pour le meilleur ou pour le pire – se déroule dans des espaces numériques. Et maintenant, les géants de l’industrie, dont Google, Meta et Microsoft, souhaitent centraliser tout cela dans un monde virtuel qui portera le nom de “métavers”.

De manière générale, les technologies qui composent le métavers peuvent inclure la réalité virtuelle (RV) – caractérisée par des mondes virtuels persistants qui continuent d’exister même lorsque vous ne jouez pas – ainsi que la réalité augmentée (RA) qui combine des aspects des mondes numérique et physique. Il n’est toutefois pas nécessaire que ces espaces soient exclusivement accessibles via la RV ou la RA. Un monde virtuel, tel que les aspects de Fortnite auxquels on peut accéder via un PC, une console de jeu ou même un téléphone, peut également y donner accès. Cependant, mardi, Intel a démontré que pour donner vie au métavers, il y avait encore du chemin à parcourir.

Intel, qui était resté jusqu’à présent silencieux face à cette frénésie autour du métavers, s’est exprimé sur la façon dont ce peut devenir une réalité. « Le métavers pourrait être la prochaine grande plateforme informatique après le World Wide Web et le mobile », a écrit Raja Koduri, vice-président senior et responsable du groupe “Accelerated Computing Systems and Graphics” d’Intel, dans un éditorial mardi. Toutefois, Koduri ne tarde pas à jeter de l’eau froide sur l’idée que le métavers est à portée de main. « Notre infrastructure informatique, de stockage et de réseau n’est tout simplement pas suffisante pour permettre cette vision », a-t-il écrit.

Koduri a préféré jouer la carte du réalisme plutôt que celle de l’enthousiasme comme ses pairs. Ainsi, Koduri ne pense même pas que l’industrie soit proche du métavers. Il a déclaré que le métavers nécessiterait que l’on multiplie par 1 000 la puissance de notre capacité de calcul collective actuelle. En effet, une grande partie du battage médiatique autour des métavers a été construite autour de ce que vous y ferez, qu’il s’agisse de réunions en réalité virtuelle, de concerts numériques et, bien sûr, d’intégrations basées sur la blockchain et les NFT. L’avenir des casques de réalité virtuelle et augmentée suscite également beaucoup d’enthousiasme.

Mais les véritables éléments constitutifs du métavers ne seront pas seulement des logiciels et des espaces virtuels (ce qui, bien sûr, est un combat en soi, étant donné que les mondes numériques d’aujourd’hui sont extrêmement autonomes) ou même les casques et les gadgets que les gens portent pour y “accéder”. Ce sera dans les ordinateurs et les serveurs qui font fonctionner les vastes mondes virtuels partagés qui constituent le métavers. Et c’est cela le véritable défi. « Les ordinateurs d’aujourd’hui ne sont tout simplement pas assez puissants pour faire de ces rêves une réalité. Ils n’en sont même pas proches », explique Koduri.

Selon certaines critiques, l’affirmation de Koduri est presque ridiculement évidente. À titre illustratif, l’espace VR phare de Meta, Horizon Worlds, ne peut accueillir plus de 20 participants par espace, et ce pour des mondes animés de base, de type Roblox. Pour rappel, Roblox est une plateforme numérique qui permet à ses utilisateurs d’interagir dans un monde virtuel. Elle est à la fois un lieu de jeux gratuits, un moteur de création qui permet aux utilisateurs de générer leurs propres activités et une place de marché pour vendre ces expériences, ainsi que des produits dérivés comme des tenues pour un avatar personnalisé.

Les plateformes métavers actuelles donnent raison à Koduri

L’état de l’art de la RV nécessite toujours des milliers de dollars de matériel de jeu PC, avec de nombreux inconvénients (comme la nécessité d’un casque connecté et des graphismes qui ne sont toujours pas à la hauteur de ce que les meilleurs jeux à écran plat de 2021 peuvent offrir). Et même les plus grands jeux vidéo classiques qui ne sont pas confrontés aux exigences supplémentaires de la RV, comme Fortnite ou Battlefield 2042, ne peuvent gérer que 100 à 128 joueurs à la fois. Comme le note Koduri dans son éditorial, il n’est pas possible de mettre deux personnes dans un environnement virtuel vraiment détaillé avec la technologie actuelle.

« Considérez ce qui est nécessaire pour mettre deux individus dans un cadre social dans un environnement entièrement virtuel : des avatars convaincants et détaillés avec des vêtements, des cheveux et des tons de peau réalistes – le tout rendu en temps réel et basé sur des données de capteurs capturant des objets 3D du monde réel, des gestes, de l’audio et bien plus encore ; le transfert de données à des bandes passantes super élevées et des latences extrêmement faibles ; et un modèle persistant de l’environnement, qui peut contenir des éléments réels et simulés », a tenté d’illustrer Koduri dans son éditorial.

Et ce n’est que pour deux personnes – passer à l’échelle des centaines de millions d’utilisateurs qu’un concept de métavers de type Ready Player One, Snow Crash ou Matrix nécessiterait une infrastructure informatique beaucoup, beaucoup plus importante. Bien entendu, le fondeur américain a également tout intérêt à affirmer que pour donner véritablement vie au métavers à l’échelle mondiale, l’industrie a besoin d’ordinateurs et de serveurs plus nombreux et plus performants. Après tout, Intel fabrique des processeurs (et bientôt des GPU) pour les appareils grand public comme pour les centres de données.

Si le métavers a besoin d’une capacité de calcul littéralement multipliée par 1 000, c’est tout simplement bon pour les affaires. En sus, ce n’est pas une coïncidence si Intel a explicitement mentionné ses processeurs de calcul client et de nuage ainsi que ses produits graphiques dans son dossier sur le métavers. Cela dit, le problème est que même Intel ne pense pas que le matériel seul va permettre de multiplier la puissance de calcul par 1 000. Comme l’a expliqué Koduri plus tôt dans la semaine, « nous pensons qu’une courbe standard de type loi de Moore ne nous permettra d’atteindre qu’une croissance de 8 à 10 fois au cours des cinq prochaines années ».

(La loi de Moore est généralement définie comme un doublement de la capacité de calcul tous les deux ans, ce qui correspond à la croissance de huit à dix fois prévue par Koduri.) Au lieu de cela, Koduri prévoit avec optimisme que les algorithmes et les améliorations logicielles combleront l’écart. À cela s’ajouteront des choses comme des réseaux neuronaux alimentés par l’apprentissage automatique ou des techniques de calcul améliorées par l’IA. Intel utilise déjà ces techniques pour des choses comme sa technologie Deep Link ou son échantillonnage XeSS qu’il prévoit de lancer avec ses GPU Arc au début de l’année prochaine.

L’entreprise compte sur les algorithmes ou l’IA pour multiplier par cent (ou plus) la capacité de calcul, en plus de la croissance offerte par sa feuille de route matérielle existante. Koduri note que l’amélioration des logiciels et des algorithmes ne sera pas seulement nécessaire pour combler l’écart dans le délai ambitieux de cinq ans qu’il a fixé ; elle sera cruciale pour aider à atténuer l’augmentation de la consommation d’énergie qu’entraînerait une tentative de résolution du problème par force brute, ce qu’il compare aux problèmes actuels de l’extraction de cryptomonnaies.

Selon les critiques, le fait qu’Intel réfléchisse à tout cela maintenant – et énonce le problème – est un signe encourageant. Il est facile de profiter de l’engouement et de lancer des idées fantastiques pour vendre des NFT qui vous suivront d’un endroit à l’autre dans différents jeux et environnements virtuels. Renforcer l’infrastructure des serveurs et s’efforcer de réduire la latence est moins excitant ; mais comme le montre la présentation d’Intel, si le métavers doit un jour atteindre ses ambitions de science-fiction, il y a beaucoup plus de travail fondamental à faire dans les années à venir pour ouvrir la voie.

Lire aussi : Le Métavers est une arnaque : Nous sommes entassés dans la matrice

Sources : DeveloppezIntel


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