Des physiciens affirment qu’il pourrait exister des planètes entièrement constituées de matière noire


Nous n’avons peut-être pas trouvé beaucoup de systèmes planétaires semblables au nôtre, pourtant, il y a une chose qu’ils semblent avoir en commun : ils paraissent constitués de bonne vieille matière baryonique, la matière ordinaire dont notre système planétaire est constitué.

Mais que se passerait-il s’il existait des planètes composées d’autres éléments : des particules qui ne font pas partie du modèle standard ? Et s’il existait des planètes composées de cette matière mystérieuse que l’on appelle la matière noire ou matière sombre ?

Personne ne peut répondre à cette question d’une manière ou d’une autre, du moins dans l’état actuel de nos connaissances. Mais une équipe de scientifiques dirigée par le physicien théoricien Yang Bai, de l’université du Wisconsin à Madison, aux États-Unis, a voulu savoir comment ces hypothétiques planètes se manifesteraient et s’il serait possible de les détecter si elles existaient vraiment.

La réponse est oui, si certaines conditions sont réunies, et les chercheurs ont expliqué pourquoi dans une étude publiée cette semaine (lien plus bas).

L’univers dans lequel nous vivons recèle de nombreux mystères, mais l’un des plus importants est sans doute celui de la matière noire. Nous ne savons pas ce que c’est, ni à quoi elle ressemble, ni de quoi elle est faite. La seule chose dont nous sommes sûrs, c’est que la gravité dans l’Univers dépasse largement la quantité de matière baryonique.

Une fois que l’on a pris en compte toutes les galaxies, toutes les étoiles et tous les nuages de poussière qui dérivent silencieusement et dans l’obscurité entre les étoiles, il y a toujours beaucoup plus de gravité qu’il ne devrait y en avoir. Nous ne savons pas ce qui en est responsable, mais nous appelons cette source mystérieuse, la matière noire, et il existe plusieurs candidats théoriques que les scientifiques étudient.

D’une manière générale, ces sources peuvent être divisées en deux catégories : les particules uniques et les composites, y compris les boules macroscopiques de matière noire, ou Macros, qui pourraient avoir une masse à l’échelle d’une planète.

Comme l’expliquent Bai et ses collègues :

Un état macroscopique de matière noire dont la masse et/ ou le rayon sont similaires à ceux d’une planète se comportera comme une exoplanète sombre s’il est lié à un système stellaire, même si la physique sous-jacente de l’objet ressemble à quelque chose d’entièrement différent.

Nos méthodes actuelles de détection des exoplanètes sont en grande partie basées sur l’effet d’une exoplanète sur la lumière de son étoile hôte. Nous pouvons également utiliser cette information pour mesurer les propriétés de l’exoplanète.

Une exoplanète qui passe entre nous et son étoile, un passage connu sous le nom de transit, provoque une légère diminution de la lumière de l’étoile. Les astronomes peuvent mesurer l’intensité de cet obscurcissement pour calculer le rayon de l’exoplanète.

Le transit, une méthode de détection des planètes lorsqu’elles passent devant leur étoile, en diminuant la luminosité de cette dernière. (NASA)

Par ailleurs, les exoplanètes entraînent un léger mouvement de leur étoile, les deux se déplaçant autour d’un centre de gravité commun, ce qui se traduit par des changements dans la longueur d’onde de la lumière de l’étoile. La quantité de mouvement, appelée vitesse radiale, peut être utilisée pour calculer la masse de l’exoplanète.

Animation illustrant la mesure de la vitesse radiale. (Alysa Obertas/Wikimedia)

Avec ces mesures en main, nous pouvons calculer la densité d’une exoplanète et ainsi déterminer comment elle est constituée. Une faible densité, comme celle de Jupiter, implique une atmosphère immense et peu dense, une géante gazeuse. Une densité plus élevée, comme celle de la Terre, implique une composition rocheuse. En général, les rayons des géantes gazeuses sont plus grands que ceux des géantes terrestres.

Selon Bai et ses collègues, ces données pourraient être utilisées pour détecter d’éventuelles exoplanètes à matière noire. Celles-ci pourraient présenter des propriétés bien différentes de celles des exoplanètes ordinaires, défiant ainsi nos connaissances actuelles sur la formation des planètes. On pourrait ainsi obtenir une exoplanète plus dense que le fer, par exemple, ou une exoplanète si peu dense que son existence est impossible à expliquer. À l’heure actuelle, aucune exoplanète de ce type n’a été identifiée, mais un scientifique peut rêver/ théoriser.

En outre, les astronomes ont pu sonder l’atmosphère des exoplanètes en se basant sur les données de transit. Ils mesurent le spectre de la lumière de l’étoile pendant les transits et le comparent à la lumière de l’étoile en temps normal, en recherchant des longueurs d’onde plus ou moins brillantes. Cela signifie qu’une partie de la lumière a été absorbée et/ ou réémise par des molécules présentes dans l’atmosphère de l’exoplanète. Les scientifiques peuvent analyser ces données pour déterminer quelles sont ces molécules. Si le spectre de transit révèle de grandes anomalies, cela pourrait indiquer la présence d’une exoplanète à matière noire. Si la vitesse radiale suggère qu’une exoplanète devrait transiter, mais qu’aucun transit n’est observé, cela pourrait être un indice de la présence d’exoplanètes à matière noire. Et si la courbe de lumière d’un transit présente une forme inattendue, cela peut également être un indice.

Selon les chercheurs :

En raison de sa force d’interaction minime, mais non décroissante avec les particules du modèle standard, l’exoplanète de matière noire peut ne pas être complètement opaque, ce qui rend la forme de sa courbe de lumière distincte de celle d’une exoplanète ordinaire.

Bai et ses collègues ont calculé à quoi pourrait ressembler cette courbe de lumière, jetant ainsi les bases d’une analyse théorique plus complexe.

L’équipe note que le travail pourrait être amélioré à plusieurs égards. Par exemple, ils n’ont pris en compte que les orbites circulaires, or, de nombreuses exoplanètes ont des orbites elliptiques, en particulier celles qui ont été capturées par la gravité d’une étoile, comme on pourrait s’attendre à ce que les exoplanètes à matière noire le soient. En outre, les propriétés des planètes sont restées relativement simples.

Les chercheurs de conclure :

Des études plus approfondies sur la formation précoce d’exoplanètes de matière noire dans des systèmes stellaires et sur leur capture permettraient d’élucider la possibilité de détecter des exoplanètes de matière noire et seraient nécessaires pour fixer des limites à l’abondance de ces exoplanètes si elles n’étaient pas détectées.

L’étude disponible en prépublication dans arXiv : Dark Exoplanets.

Lire aussi : Matière noire : comment le minuscule télescope de l’ESA en révélera plus sur ce mystère

Source : GuruMeditation


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