Future loi française contre la haine : vers une peine d’interdiction temporaire des réseaux sociaux


Et la naissance d’une juridiction spécialisée

La proposition de loi destinée à combattre les contenus haineux en ligne, portée par la députée LREM Laetitia Avia, est prête depuis la semaine précédente. Selon le Journal du Dimanche, la députée devrait la présenter à son groupe en début de la semaine dernière. La proposition vise les « accélérateurs de contenus », un nouveau statut regroupant entre autres les réseaux sociaux (Twitter, Facebook, Instagram…) ou les moteurs de recherche. Selon le texte, leur première obligation sera de supprimer sous vingt-quatre heures un contenu illégal (incitation à la haine, injure raciste, antisémite, homophobe, etc.) signalé. Selon le Journal du Dimanche, la proposition de loi intégrera aussi une peine d’interdiction d’utilisation des réseaux sociaux pendant une durée déterminée.

Le président Emmanuel Macron avait promis en fin février, lors du dîner du Crif (Conseil représentatif des institutions juives de France), un texte pour renforcer la lutte contre le racisme et l’antisémitisme sur Internet, et l’idée d’interdiction temporaire des réseaux sociaux y avait été émise par le président français. Mais jusqu’à présent, elle n’avait pas été intégrée à la proposition de loi déposée fin mars à l’Assemblée nationale. La raison évoquée par la députée Laetitia Avia est que le sujet exigeait « davantage d’auditions et de travaux ». « Je n’oublie pas non plus la réalité, tempérait la parlementaire, rien n’empêche quelqu’un de se récréer un compte. On sait tous comment on peut user d’Internet et toutes ses possibilités », a-t-elle confié à un site Web.

La députée LREM Laetitia Avia qui porte la proposition de loi contre la haine

La proposition de loi vise les structures ayant un nombre d’utilisateurs mensuels supérieur à un certain seuil, qui sera fixé par décret, et l’élue plaide pour 2 millions d’utilisateurs. Ensuite, pour faciliter les signalements, la proposition de la députée LREM prévoit d’harmoniser les procédures. Elle propose la création d’un bouton unique, commun à toutes les plateformes, « qui pourra être enseigné à l’école et au collège dans les sessions d’éducation au numérique », a-t-elle précisé la semaine précédente.

En plus de la peine d’interdiction temporaire d’utilisation des réseaux sociaux, la députée va mettre l’accent sur l’instauration d’un parquet spécialisé sur le numérique. A ce propos, l’auteure de la proposition de loi contre la haine sur Internet a déclaré : « Nous allons mettre en place un parquet spécialisé numérique ». Selon la députée Avia, l’objectif est de « déployer des moyens humains, techniques et budgétaires » dans une structure « maîtrisant les spécificités de la sphère numérique », face au trop grand nombre d’enquêtes qui n’aboutissent pas, a rapporté le Journal du Dimanche. Elle a également précisé : « Il ne faut pas seulement responsabiliser les plateformes du Web, mais aussi les pouvoirs publics à travers la justice ». Le texte devrait être examiné à l’Assemblée à partir de la mi-juin.

Ces efforts de réglementation de l’Internet en général et des réseaux sociaux en particulier ont été appréciés le 10 mai dernier par Mark Zuckerberg, le PDG de l’une des plateformes numériques utilisées par les individus malveillants pour propager les contenus haineux et terroristes sur la toile. Après sa réunion avec le président Emmanuel Macron à Paris, Zuckerberg a jugé « encourageant » et salué l’initiative comme un modèle pour l’Union européenne : « J’ai bon espoir qu’elle pourra devenir un modèle » utilisé « dans l’Union européenne ».

L’élue veut voir s’installer cette juridiction spécialisée à Nanterre (Hauts-de-Seine), près des locaux de Pharos, la plateforme publique de signalement de ces contenus illicites. L’idée est encore à l’étude à la chancellerie, toutefois, la députée LREM assure être à « 100 % sur la même ligne » que la garde des Sceaux, Nicole Belloubet, avec qui elle a encore échangé jeudi dernier, sur la mise en place de ce parquet. Par ailleurs, selon le Journal du Dimanche, en dépit des quelques réserves des magistrats, cette nouvelle structure figurera bien dans la proposition de loi.

Au-delà des réseaux sociaux tels Facebook ou Twitter, et des moteurs de recherche comme Google, la loi s’appliquera également aux plateformes comme Uber, a rapporté le Journal du Dimanche. A défaut de pouvoir supprimer le contenu haineux signalé sous vingt-quatre heures, le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) pourra également sanctionner les plateformes numériques fautives d’une amende pouvant aller jusqu’à 4 % du chiffre d’affaires mondial et annuel. Le CSA devra aussi réclamer des rapports réguliers sur les moyens mis en œuvre par les plateformes pour atteindre les objectifs légaux.

Le plus grand des réseaux sociaux, Facebook, n’est non seulement pas d’accord avec le délai de vingt-quatre heures réservé aux médias sociaux pour parvenir à débarrasser leur plateforme du contenu illicite signalé, mais aussi le choix de retenir le chiffre d’affaires mondial plutôt que national ne lui convient pas. Toutefois, ces dispositions devraient se trouver dans la disposition finale après l’examen de la proposition qui commence en juin. C’est d’ailleurs après la diffusion en direct de la fusillade de Christchurch en Nouvelle-Zélande qui a occasionné 51 morts et la propagation rapide des images de la tuerie sur le réseau de Facebook que les efforts français de régulation de l’Internet se sont précisés.

Les autorités françaises progressent dans la nouvelle structure légale contre la haine sur Internet qui devrait intégrer l’interdiction temporaire des réseaux sociaux. Attendons de voir ce qui sera retenu pour les autres comptes réseaux sociaux (Facebook, Twitter, Instagram,…) d’une personne dont un compte a été frappé par la mesure d’interdiction temporaire.

Lire aussi : Qu’est-ce que «l’appel de Christchurch» lancé par la France et la Nouvelle-Zélande ?

Sources : Developpez.com par Stan AdkensLe Journal du Dimanche


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