Le rôle de l’hippocampe dans la façon dont les humains voyagent mentalement dans le temps et l’espace

Les cerveaux humains et animaux peuvent représenter les événements dans le temps et l’espace de manière fascinante, par exemple en accédant à une chronologie des événements qui se sont produits dans le passé via des stimuli perçus par les sens.

Dans le cerveau humain, les dimensions spatiales et temporelles des événements sont combinées et se manifestent dans ce que l’on appelle la mémoire épisodique, qui peut être déclenchée à tout moment pendant qu’une personne navigue dans le monde.

La mémoire épisodique fait référence à la capacité de l’homme à se rappeler et à jouer des expériences ou des événements spécifiques du passé. Des études antérieures en neurosciences suggèrent que la cartographie de l’espace-temps associée à la mémoire épisodique est ancrée dans une région spécifique du cerveau : l’hippocampe.

D’après les résultats des recherches menées jusqu’à présent, l’homme est la seule espèce sur Terre capable d’imaginer des séquences chronologiques qui ne se sont jamais produites mais qui pourraient être liées d’une certaine manière à des événements réels. Cette capacité est à la base de ce que l’on appelle le raisonnement causal, qui consiste à identifier les relations de cause à effet, comme par exemple « si cette chose se produit dans le futur, alors cette autre chose pourrait se produire ».

Des chercheurs de l’École Polytechnique Fédérale de Lausanne, de Manipal Institute of Technology et de l’Université Paris-Saclay ont récemment mené une étude sur le rôle des régions cérébrales au sein de la formation de l’hippocampe dans la capacité de l’homme à naviguer à travers des événements imaginaires enracinés dans un temps ou un espace différent. Leur article, publié dans le MIT Press Journal of Cognitive Neuroscience, offre de nouvelles perspectives intéressantes sur les fondements neuronaux de ce que l’on appelle le temps psychologique ordinal dans le cerveau humain.

« Nous avons demandé si la formation de l’hippocampe est impliquée dans la navigation mentale dans le temps (et l’espace), ce qui nécessite des manipulations internes des événements dans le temps et l’espace dans une perspective égocentrique », ont écrit les chercheurs dans leur article. « Pour répondre à cette question, nous avons réanalysé un ensemble de données de magnétoencéphalographie recueillies pendant que les participants se projetaient dans le temps ou dans l’espace et ordonnaient les événements historiques comme se produisant avant/après ou ouest/est du moi mental. »

Baptiste Gauthier, Pooja Prabhu, Karunakar A. Kotegar et Virginie van Wassenhove, l’équipe de chercheurs à l’origine de l’étude, ont effectué une analyse approfondie d’un ensemble de données qu’ils avaient recueillies dans l’un de leurs précédents travaux. Dans leur étude précédente, ils ont utilisé des techniques de neuroimagerie à résolution temporelle pour caractériser l’activité cérébrale d’un groupe de personnes à qui l’on a demandé d’imaginer des événements historiques de manière chronologique à partir de différentes perspectives mentales dans le temps (par exemple, neuf ans dans le futur) ou dans différents espaces (par exemple, dans un lieu spécifique).

Dans leur nouvel article, les chercheurs passent en revue les données qu’ils ont précédemment recueillies en utilisant une méthode différente. Comme la méthode qu’ils ont utilisée dans leur étude précédente avait des limites importantes qui les empêchaient d’étudier l’implication de l’hippocampe, ils l’ont remplacée par une technique qui tient compte explicitement du volume de l’hippocampe.

La nouvelle méthode de reconstruction de la source qu’ils ont utilisée leur a permis de clarifier comment les structures profondes de la formation de l’hippocampe sont impliquées dans la capacité de l’homme à ordonner mentalement des événements imaginés dans le temps et l’espace dans une perspective égocentrique. La formation de l’hippocampe est composée de plusieurs structures cérébrales, dont les hippocampes bilatéraux, le cortex entorhinal et le cortex parahippocampique.

« Nous avons constaté une implication sélective des lobes temporaux médians (MTL) avec une latéralisation notable des principaux effets : Alors que l’ordinalité temporelle a surtout touché le MTL gauche, l’ordinalité spatiale a surtout touché le MTL droit », ont écrit les chercheurs.

Les résultats des analyses éclairent la contribution des régions cérébrales au sein de la formation de l’hippocampe dans le temps psychologique ordinal. Bien que la fonction exacte de ces régions ne soit pas encore claire, leurs travaux suggèrent qu’elles jouent un rôle clé dans l’ordonnancement mental d’événements hypothétiques ou imaginaires se produisant en différents endroits et à différents moments.

Dans leur article, Gauthier, Prabhu, Kotegar et Wassenhove présentent également une hypothèse concernant la manière dont le voyage mental dans le temps et l’espace pourrait être traité par la formation de l’hippocampe. Plus précisément, ils suggèrent que la capacité de l’homme à imaginer des voyages vers différents endroits ou à différentes époques pourrait être guidée par un contrôle descendant de l’activité neuronale au sein de cette formation cérébrale particulière.

Il est intéressant de noter que les modèles sélectifs d’activité neuronale signalés par les chercheurs se produisent lorsque les humains ordonnent mentalement des événements qu’ils n’ont jamais vécus dans la vie réelle (c’est-à-dire des événements non épisodiques), mais pas lorsqu’ils revisitent mentalement des événements réels de leur passé. À l’avenir, leurs conclusions pourraient ouvrir la voie à de nouvelles études sur le temps psychologique ordinal dans le cerveau humain et se concentrer sur la formation de l’hippocampe, peut-être en utilisant de nouvelles méthodes ou de nouveaux ensembles de données.

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Source : Medical Xpress – Traduit par Anguille sous roche