La Lune a assez d’oxygène pour soutenir 16 milliards de personnes pendant 50 000 ans


Que faudrait-il donc pour exploiter ce potentiel ?

Le cratère Aristarchus vu par la caméra de cartographie d’Apollo 15. NASA/Wikimedia

Parallèlement aux progrès de l’exploration spatiale, nous avons récemment vu beaucoup de temps et d’argent investis dans des technologies qui pourraient permettre une utilisation efficace des ressources spatiales. Au premier rang de ces efforts figure la recherche de la meilleure façon de produire de l’oxygène sur la Lune.

En octobre 2021, l’Agence spatiale australienne et la NASA ont signé un accord pour envoyer un rover de fabrication australienne sur la Lune dans le cadre du programme Artemis, dans le but de collecter des roches lunaires qui pourraient à terme fournir de l’oxygène respirable sur la Lune.

Bien que la Lune ait une atmosphère, celle-ci est très fine et composée principalement d’hydrogène, de néon et d’argon. Ce n’est pas le genre de mélange gazeux qui pourrait faire vivre des mammifères dépendants de l’oxygène comme les humains.

Cela dit, il y a en fait beaucoup d’oxygène sur la Lune. Il ne se trouve simplement pas sous forme gazeuse. Il est piégé dans le régolithe, la couche de roche et de poussière fine qui recouvre la surface de la Lune. Si nous pouvions extraire l’oxygène du régolithe, serait-il suffisant pour permettre la vie humaine sur la Lune ?

L’étendue de l’oxygène

On trouve de l’oxygène dans de nombreux minéraux du sol qui nous entoure. Et la Lune est principalement constituée des mêmes roches que celles que l’on trouve sur Terre (avec toutefois une quantité légèrement supérieure de matériaux provenant de météores).

Des minéraux tels que la silice, l’aluminium, le fer et les oxydes de magnésium dominent le paysage lunaire. Tous ces minéraux contiennent de l’oxygène, mais pas sous une forme accessible à nos poumons.

Sur la Lune, ces minéraux existent sous différentes formes, notamment des roches dures, de la poussière, du gravier et des pierres qui recouvrent la surface. Ces matériaux sont le résultat de l’impact des météorites qui se sont écrasées sur la surface lunaire au cours d’innombrables millénaires.

Certaines personnes appellent la couche superficielle de la Lune le “sol” lunaire, mais en tant que pédologue, j’hésite à utiliser ce terme. Le sol tel que nous le connaissons est une chose assez magique qui n’existe que sur Terre. Il a été créé par un large éventail d’organismes travaillant sur le matériau d’origine du sol – le régolithe, dérivé de la roche dure – pendant des millions d’années.

Le résultat est une matrice de minéraux qui n’étaient pas présents dans les roches d’origine. Le sol de la Terre est doté de caractéristiques physiques, chimiques et biologiques remarquables. Pendant ce temps, le matériau à la surface de la Lune est essentiellement du régolithe dans sa forme originale et intacte.

Une substance entre, deux sortent

Le régolithe de la Lune est composé d’environ 45% d’oxygène. Mais cet oxygène est étroitement lié aux minéraux mentionnés ci-dessus. Pour briser ces liens solides, nous devons fournir de l’énergie.

Cela vous est peut-être familier si vous connaissez l’électrolyse. Sur Terre, ce processus est couramment utilisé dans l’industrie manufacturière, par exemple pour produire de l’aluminium. On fait passer un courant électrique à travers une forme liquide d’oxyde d’aluminium (communément appelé alumine) via des électrodes, pour séparer l’aluminium de l’oxygène.

Dans ce cas, l’oxygène est produit comme un sous-produit. Sur la Lune, l’oxygène serait le produit principal et l’aluminium (ou autre métal) extrait serait un sous-produit potentiellement utile.

C’est un processus assez simple, mais il y a un hic : il est très gourmand en énergie. Pour être durable, il devrait être soutenu par l’énergie solaire ou d’autres sources d’énergie disponibles sur la Lune.

L’extraction de l’oxygène du régolithe nécessiterait également un équipement industriel important. Il faudrait d’abord convertir l’oxyde métallique solide en liquide, soit en appliquant de la chaleur, soit en combinant la chaleur avec des solvants ou des électrolytes. Nous disposons de la technologie pour le faire sur Terre, mais transporter cet appareil sur la Lune – et générer suffisamment d’énergie pour le faire fonctionner – sera un défi de taille.

Au début de l’année, la start-up Space Applications Services, basée en Belgique, a annoncé qu’elle construisait trois réacteurs expérimentaux pour améliorer le processus de production d’oxygène par électrolyse. Elle espère envoyer cette technologie sur la Lune d’ici 2025 dans le cadre de la mission ISRU (utilisation in situ des ressources) de l’Agence spatiale européenne.

Quelle quantité d’oxygène la Lune pourrait-elle fournir ?

Cela dit, lorsque nous réussirons à le faire, quelle quantité d’oxygène la Lune pourrait-elle réellement fournir ? Eh bien, pas mal, en fait.

Si l’on ne tient pas compte de l’oxygène contenu dans les roches dures plus profondes de la Lune – et que l’on se contente du régolithe, facilement accessible à la surface – on peut faire quelques estimations.

Chaque mètre cube de régolithe lunaire contient en moyenne 1,4 tonne de minéraux, dont environ 630 kilogrammes d’oxygène. Selon la NASA, les humains doivent respirer environ 800 grammes d’oxygène par jour pour survivre. Ainsi, 630 kg d’oxygène permettraient à une personne de rester en vie pendant environ deux ans (ou un peu plus).

Supposons maintenant que la profondeur moyenne du régolithe sur la Lune est d’environ dix mètres et que nous pouvons en extraire tout l’oxygène. Cela signifie que les dix premiers mètres de la surface de la Lune fourniraient suffisamment d’oxygène pour faire vivre les huit milliards d’habitants de la Terre pendant environ 100 000 ans.

Cela dépendrait également de l’efficacité avec laquelle nous parviendrions à extraire et à utiliser l’oxygène. Quoi qu’il en soit, ce chiffre est assez étonnant !

Cela dit, nous sommes plutôt bien lotis sur Terre. Et nous devrions faire tout ce qui est en notre pouvoir pour protéger la planète bleue – et son sol en particulier – qui continue à soutenir toute la vie terrestre sans même que nous ayons à essayer.

Lire aussi : De l’eau et de l’oxygène à partir de roches lunaires ? Comment les astronautes peuvent-ils survivre sur la Lune ?

Source : The Conversation – Traduit par Anguille sous roche


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