Le philosophe grec qui est « mort de rire » après avoir vu un âne manger des figues


Avez-vous déjà raconté une blague si drôle que vous en avez ri vous-même ? En avez-vous déjà raconté une si drôle que vous en êtes mort ? Apparemment, le philosophe grec stoïcien Chrysippus de Soli l’a fait.

Peut-on mourir de rire ? Apparemment, Chrysippus de Soli l’a fait après avoir vu un âne manger des figues. Image credit: Giuseppe Porta, Public Domain

La blague “mortelle” qui l’a tué ? Après avoir vu qu’un âne avait mangé toutes ses figues, Chrysippe – farceur fou qu’il était – a demandé à quelqu’un de lui donner du vin à boire. Il s’est ensuite mis à mourir de rire. Il fallait être là, je suppose.

L’histoire est détaillée dans Lives of Eminent Philosophers, Volume I, écrit à l’origine par Diogène Laertius et traduit plus tard par R. D. Hicks, où l’on peut lire ceci :

“Certains disent qu’il est mort d’une crise de rire immodérée. En effet, voyant son âne manger des figues, il dit à sa vieille femme de donner à l’âne du vin non mélangé pour qu’il boive ensuite, puis il se mit à rire si violemment qu’il mourut.”

Cependant, si l’on en croit les écrits de Mikhaïl Bakhtine dans Rabelais et son monde, Chrysippe n’est pas le seul à être mort de rire en ce jour funeste.

“Bakhtine cite la description par Rabelais de la mort de Chrysippe et de Maître Janotus (qui se sont tous deux moqués de l’âne ivre)”, peut-on lire dans un article de recherche publié dans la revue Differences, démontrant apparemment que certains gags sont tellement drôles qu’ils peuvent donner lieu à deux accusations de meurtre au premier degré.

Aussi drôle qu’il soit d’imaginer un philosophe stoïque grec et son ami s’esclaffant à mort devant un âne ivre de vin, leurs morts ont été enregistrées, traduites et interprétées pendant plus de deux millénaires. Il est donc difficile de savoir avec certitude quelle était la cause du décès, et il est probable que si les Grecs avaient eu accès au type d’examens post-mortem que nous utilisons aujourd’hui, ils seraient parvenus à une conclusion différente.

La description de leurs derniers instants par Bakhtine n’est certainement pas des plus réjouissantes.

“‘Leurs yeux larmoyaient à la violente commotion de la substance cérébrale qui pressait ces humidités lacrymales et les faisait s’écouler par les nerfs optiques’.”

Aïe.

Ne vous laissez pas tromper par l’express de pierre, Chrysippus était un boute-en-train. Crédit image : Par un artiste inconnu – Marie-Lan Nguyen (2011), Domaine Public

Cela dit, Chrysippe passe pour un marchand de vent dans les écrits de Laertius, qui raconte une anecdote classique dans laquelle le philosophe, à qui un homme demandait : “A qui dois-je confier mon fils ?”, répondait : “A moi, car si je pensais qu’il y avait quelqu’un de meilleur que moi, je me serais adressé à lui pour qu’il m’enseigne la philosophie.”

Classique Chrysippus.

Peut-on mourir de rire ?

Selon le Dr Claire Asher de Science Focus, il est tout à fait possible de mourir de rire – bien que les cas soient rares et que l’on pense qu’une crise de rire puisse déclencher une crise cardiaque ou une suffocation.

L’émission comique The Goodies de Bill Oddie, diffusée dans les années 70, a provoqué un tel décès lorsqu’un résident britannique, Alex Mitchell, a été victime d’une crise cardiaque fatale après avoir ri pendant 30 minutes. Les médecins ont par la suite diagnostiqué chez la fille de Mitchell un syndrome du QT long, qui, selon eux, aurait pu causer sa mort.

Dans ce qui est sans doute une façon moins amusante de mourir, Arthur Cobcroft, résident australien, est mort de rire en comparant les prix des produits de base en 1915 à ceux de 1920, année de son décès. On considère qu’il est mort d’une insuffisance cardiaque provoquée par le rire excessif des médecins, un sombre réquisitoire contre l’inflation.

Dans le film Joker de 2019, Joaquin Phoenix s’est inspiré de l’affect pseudobulbaire pour son rôle d’Arthur Fleck qui est sujet à des crises de rire pathologique. L’affect pseudobulbaire est un diagnostic clinique caractérisé par des épisodes d’émotion extrême et incontrôlable, comme le rire ou les pleurs.

Cet état est associé à un dysfonctionnement du cerveau et à certains troubles neurodégénératifs. S’il peut nuire considérablement à la vie sociale ou à la capacité de travail d’une personne, il n’est généralement pas considéré comme dangereux pour la santé. Cependant, les symptômes associés, à savoir un réflexe nauséeux exagéré, une faiblesse de la langue et des difficultés de déglutition, peuvent augmenter les risques de suffocation lors d’un fou rire.

Nous ne saurons probablement jamais si Chrysippe est tombé dans l’une de ces pathologies, mais il vaut mieux éviter de donner du vin aux ânes farcis de figues, au cas où.

Lire aussi : Les Grecs anciens ont prédit l’atome il y a 2400 ans

Source : IFLScience – Traduit par Anguille sous roche


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