La photosynthèse artificielle pourrait être le secret de la colonisation de l’espace


La vie sur Terre doit son existence à la photosynthèse, un processus vieux de 2,3 milliards d’années.

Impression d’artiste de la première planète Mars avec une atmosphère. (Centre de vols spatiaux Goddard de la NASA)

Cette réaction extrêmement fascinante (et encore mal comprise) permet aux plantes et à d’autres organismes de capter la lumière du soleil, l’eau et le dioxyde de carbone et de les convertir en oxygène et en énergie sous forme de sucre.

La photosynthèse fait tellement partie intégrante du fonctionnement de la Terre que nous la tenons pour acquise. Mais lorsque nous regardons au-delà de notre propre planète pour trouver des endroits à explorer et à coloniser, il devient évident que ce processus est rare et précieux.

Comme mes collègues et moi-même l’avons étudié dans un nouvel article publié dans Nature Communications, les récentes avancées dans la fabrication de photosynthèse artificielle pourraient bien être la clé de la survie et de l’épanouissement loin de la Terre.

Le besoin d’oxygène de l’homme rend les voyages spatiaux délicats. Les contraintes de carburant limitent la quantité d’oxygène que nous pouvons emporter avec nous, en particulier si nous voulons effectuer des voyages de longue durée vers la Lune et Mars. Un voyage aller simple vers Mars dure généralement deux ans, ce qui signifie que nous ne pouvons pas facilement envoyer des ressources depuis la Terre.

Il existe déjà des moyens de produire de l’oxygène en recyclant le dioxyde de carbone dans la Station spatiale internationale. La majeure partie de l’oxygène de l’ISS provient d’un processus appelé « électrolyse », qui utilise l’électricité des panneaux solaires de la station pour diviser l’eau en hydrogène et en oxygène gazeux, que les astronautes respirent.

La station dispose également d’un système distinct qui convertit le dioxyde de carbone expiré par les astronautes en eau et en méthane.

Mais ces technologies sont peu fiables, inefficaces, lourdes et difficiles à entretenir. Le processus de production d’oxygène, par exemple, requiert environ un tiers de l’énergie totale nécessaire pour faire fonctionner l’ensemble du système de l’ISS qui prend en charge le « contrôle de l’environnement et le maintien de la vie ».

Les composants et les résultats de la photosynthèse. (Daniel Mayer/Wikipedia/CC By SA 4.0)

Perspectives d’avenir

La recherche de systèmes alternatifs pouvant être utilisés sur la Lune et lors de voyages vers Mars est donc en cours. Une possibilité consiste à récolter l’énergie solaire (qui est abondante dans l’espace) et à l’utiliser directement pour la production d’oxygène et le recyclage du dioxyde de carbone dans un seul dispositif.

Le seul autre intrant dans un tel dispositif serait l’eau, à l’instar du processus de photosynthèse en cours dans la nature. Cela permettrait d’éviter les installations complexes où les deux processus de collecte de la lumière et de production chimique sont séparés, comme c’est le cas à bord de l’ISS.

Cette solution est intéressante car elle permettrait de réduire le poids et le volume du système, deux critères essentiels pour l’exploration spatiale. Mais elle serait également plus efficace.

Nous pourrions utiliser l’énergie thermique supplémentaire libérée au cours du processus de capture de l’énergie solaire directement pour catalyser (enflammer) les réactions chimiques, ce qui les accélèrerait. En outre, le câblage complexe et la maintenance pourraient être considérablement réduits.

Nous avons élaboré un cadre théorique pour analyser et prédire les performances de ces dispositifs intégrés de « photosynthèse artificielle » pour des applications sur la Lune et sur Mars.

Au lieu de la chlorophylle, qui est responsable de l’absorption de la lumière dans les plantes et les algues, ces dispositifs utilisent des matériaux semi-conducteurs qui peuvent être recouverts directement de catalyseurs métalliques simples supportant la réaction chimique souhaitée.

Notre analyse montre que ces dispositifs seraient effectivement viables pour compléter les technologies de maintien de la vie existantes, telles que le générateur d’oxygène utilisé sur l’ISS. C’est particulièrement le cas lorsqu’ils sont associés à des dispositifs qui concentrent l’énergie solaire afin d’alimenter les réactions (essentiellement de grands miroirs qui concentrent la lumière solaire entrante).

Il existe également d’autres approches. Par exemple, nous pouvons produire de l’oxygène directement à partir du sol lunaire (régolithe). Mais cela nécessite des températures élevées pour fonctionner.

Les dispositifs de photosynthèse artificielle, en revanche, pourraient fonctionner à température ambiante aux pressions que l’on trouve sur Mars et sur la Lune. Cela signifie qu’ils pourraient être utilisés directement dans des habitats et en utilisant l’eau comme ressource principale.

Ceci est particulièrement intéressant étant donné la présence stipulée d’eau glacée dans le cratère lunaire Shackleton, qui est un site d’atterrissage prévu pour les futures missions lunaires.

Sur Mars, l’atmosphère est composée de près de 96 % de dioxyde de carbone, ce qui semble idéal pour un dispositif de photosynthèse artificielle. Mais l’intensité lumineuse sur la planète rouge est plus faible que sur la Terre en raison de la plus grande distance qui la sépare du Soleil.

Cela pose-t-il un problème ? Nous avons calculé l’intensité de la lumière solaire disponible sur Mars. Nous avons montré que nous pouvons effectivement utiliser ces dispositifs sur place, même si les miroirs solaires deviennent encore plus importants.

La production efficace et fiable d’oxygène et d’autres produits chimiques, ainsi que le recyclage du dioxyde de carbone à bord des engins spatiaux et dans les habitats, constituent un défi considérable que nous devons relever pour les missions spatiales à long terme.

Les systèmes d’électrolyse existants, qui fonctionnent à des températures élevées, nécessitent un apport d’énergie important. Quant aux dispositifs de conversion du dioxyde de carbone en oxygène sur Mars, ils n’en sont qu’à leurs balbutiements, qu’ils soient basés sur la photosynthèse ou non.

Plusieurs années de recherche intense sont donc nécessaires pour pouvoir utiliser cette technologie dans l’espace. Copier les éléments essentiels de la photosynthèse naturelle pourrait nous donner des avantages, en nous aidant à les réaliser dans un futur proche.

Utilisation dans l’espace et sur Terre

Les retombées seraient énormes. Par exemple, nous pourrions créer des atmosphères artificielles dans l’espace et produire des produits chimiques dont nous avons besoin lors de missions à long terme, tels que des engrais, des polymères ou des produits pharmaceutiques.

En outre, les connaissances acquises lors de la conception et de la fabrication de ces dispositifs pourraient nous aider à relever le défi de l’énergie verte sur Terre.

Nous avons la chance de disposer de plantes et d’algues pour produire de l’oxygène. Mais les dispositifs de photosynthèse artificielle pourraient être utilisés pour produire de l’hydrogène ou des carburants à base de carbone (au lieu de sucres), ouvrant ainsi une voie verte pour la production de produits chimiques riches en énergie que nous pourrions stocker et utiliser dans les transports.

L’exploration de l’espace et notre future économie énergétique ont un objectif à long terme très similaire : la durabilité. Les dispositifs de photosynthèse artificielle pourraient bien devenir un élément clé de la réalisation de cet objectif.

Lire aussi : Un système de photosynthèse artificielle nouvellement créé est 10 fois plus efficace que les systèmes existants

Source : The Conversation – Traduit par Anguille sous roche


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